Les grandes chansons françaises : " SYRACUSE " ( Bernard Dimey - Henri Salvador).
Henri Salvador raconte qu’un soir il avait séquestré un Bernard Dimey (pas mal enivré), lui interdisant de ressortir sans avoir fini son texte ! Au petit matin, Salvador découvrait Syracuse. Chanson qui allait connaître un certain succès ! C’est avec une réelle complicité et une part de la magie de Bernard Dimey, poète trop souvent alcoolisé et vacillant de la chanson française, qu' Henri compose " Syracuse ".
Dimey naît le 16 juillet 1931. Sa mère est coiffeuse, son père ouvrier ciselier. Une revue publie ses premiers poèmes, alors qu’il n’a que quinze ans. Puis deux petits recueils paraissent chez Seghers. Dimey vit à Troyes ses années de jeune homme : écriture, journalisme, peinture, enseignement (qu’il fuit). Dans une caserne, pour noyer son chagrin, il apprend à boire : c’est le temps de la guerre d’Algérie, trop de ses copains y laissent leur peau.
Arrivé à Montmartre à 25 ans, il est le roi du village : les artistes de l’époque se retrouvent quotidiennement dans une taverne de la place du Tertre à Montmartre. Ce haut lieu de la vie poétique parisienne est fréquenté par Mouloudji, Aznavour, Patachou, Jean-Claude Pascal et Francis Lai qui deviennent ses amis et interprètes. Lors du mariage de Bernard Dimey, Henri Salvador chante la chanson qu’ils ont écrite ensemble : Syracuse. Bruno Coquatrix le pousse sur la scène de l’Olympia dont il est le propriétaire et où Dimey séduit le public simplement en disant des poèmes.
Il obtient le prix Charles Cros avec "Ivrogne et pourquoi pas". Et puis, alors que les cinquante ans s’apprêtent à sonner, le 1er juillet 1981, il part rejoindre ses amis Michel Simon et Édith Piaf…
C’est à ce grand poète épris de Montmartre dans la lignée des Bruant et Gaston Couté, que l'on doit quelques trésors de la chanson. "Syracuse" à " Mémère" chanté de manière éblouissante par Michel Simon en passant par "Mon truc en plumes" de Zizi Jeanmaire.
Henri Salvador. (13/07/1917 – 13/02/2008)
À l’âge de 7 ans, Henri Salvador quitte sa Guyane natale et arrive en métropole. Jeune homme, il découvre le jazz et rêve d’imiter ses idoles, Duke Ellington et Louis Armstrong. Ce passionné de musique étudie la trompette, le violon et la guitare.
Dans les années 30, Henri fait ses premières armes aux terrasses des cafés en tant qu’humoriste. Le public se délecte des pitreries du jeune Henri Salvador. En 1933, à 16 ans, il obtient ses premiers engagements dans les cabarets parisiens. En 1947, Henri Salvador sort son premier disque “ Maladie d’amour “, une chanson traditionnelle créole. C'est le début de cette grande carrière dont chacun se souvient.
En 1949, il obtient le grand prix du disque de l’Académie Charles Cros et se produit à l’ABC, le temple des music-halls parisiens. Cette même année paraît le titre “ Une chanson douce “, un classique de son répertoire.
C’est en compagnie de Boris Vian, son grand ami, qu’Henri Salvador composera près de 400 titres tels que “ Le blues du dentiste “ ou “ Faut rigoler “, une biguine antillaise. Ainsi que : “ Zorro est arrivé “, “ Syracuse “, “ Le Travail c’est la santé “ ou encore “ Juanita Banana “.
Après plusieurs années de silence, Henri Salvador a décidé, contre toute attente, d’enregistrer un nouvel album. Pari tenu pour ce monstre sacré qui, à l’âge de 83 ans, s’est offert une entrée fracassante dans le XXIe siècle. Plébiscité par le public et encensé par la critique, l’album “ Chambre avec vue “ connaît un immense succès.
Ce succès, Henri Salvador le doit à son talent, mais aussi à son flair. Il a su viser juste en s’entourant de jeunes artistes, auteurs et compositeurs, de talent tels Keren Ann, auteur de “ Jardin d’hiver “, Art Mengo ou Thomas Dutronc. Il a reçu les prix d’Interprète masculin de l’année et de meilleur album de l’année pour l’album “Chambre avec vue“, lors des victoires de la musique 2001. En 2006, Henri Salvador revient avec “Révérence“ un nouvel album façonné au Brésil qui contient des morceaux enregistrés à Rio dont deux avec Caetano Velosso et Gilberto Gil.
Henri Salvador nous a quittés le 13 février 2008 à l'âge de 90 ans. Il nous reste en mémoire ses splendides mélodies et son rire légendaire résonne encore à nos oreilles.
Philippe Raybaud